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Communiqués de l'AVF

L’épizootie de dermatose nodulaire contagieuse bovine ou l’affirmation de la police sanitaire des animaux comme un bien public

Un foyer de dermatose nodulaire contagieuse bovine a été détecté pour la première fois en France le 29 juin 2025. À ce jour, 47 troupeaux ont été contaminés dans deux départements, la Savoie et la Haute-Savoie. Dans ce contexte, l’Académie vétérinaire de France estime opportun de rappeler les principes qui ont fondé la police sanitaire. Sa bonne application mobilise à la fois les Services vétérinaires de l’État (Direction Départementale de la Protection des Populations - DDPP), les vétérinaires libéraux et les éleveurs.

 

 

Ce qu’est la police sanitaire

La police sanitaire des animaux fait partie de la Santé Publique Vétérinaire, qui est « l’ensemble des actions collectives, principalement régaliennes, en rapport avec les animaux sauvages ou domestiques, leurs services et leurs productions entrant notamment dans la chaîne alimentaire, qui visent à préserver les santés humaine et animale - y compris l’état de bien-être - et la santé des écosystèmes. Elle contribue ainsi au développement durable et à la mise en œuvre du concept "Une seule santé" » (définition de l’Académie vétérinaire de France – 17 juin 2021).

C’est une pratique ancienne

La police sanitaire des animaux est très ancienne. Elle s’est imposée dès le XVIII ème siècle pour lutter contre les ravages de l’épizootie de peste bovine. Elle fut à l’origine de la création des Écoles vétérinaires avec la nouvelle identité professionnelle nationale des vétérinaires praticiens. Sur le terrain, aux côtés des éleveurs, l’expertise des vétérinaires a su et continue à mettre en œuvre des mesures sanitaires parfois difficiles mais conformes à la science et nécessaires aux éleveurs pour sauvegarder l’élevage français. 

Ce dispositif sanitaire a été amélioré au fur et à mesure du développement des connaissances, des exigences sociétales et de l’expérience acquise suite aux épizooties et aux crises sanitaires accompagnant les maladies animales. Il a fait ses preuves et a permis de lutter contre l’apparition de nouvelles maladies et d’éradiquer certaines maladies endémiques dont les maladies  transmissibles à l’homme telles que la rage, la tuberculose ou la brucellose. La réglementation européenne (Règlement (UE) 2016/429 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 relatif aux maladies animales transmissibles) a repris dans ses principes le système français déjà reconnu par de nombreux pays.

C’est le résultat d’un travail partagé par les acteurs concernés

La particularité essentielle du dispositif réside dans un lien étroit entre les vétérinaires inspecteurs et les techniciens des Services vétérinaires de l’État, placés sous la tutelle du ministère chargé de l’agriculture, d’une part, et les vétérinaires libéraux, d’autre part. 

Ce lien est formalisé par « l’habilitation » sanitaire que délivre le préfet de chaque département aux vétérinaires libéraux ayant suivi une formation spécifique.. En retour ces vétérinaires libéraux s’engagent à mettre en œuvre les mesures réglementées prises par l'État. Ainsi, les Services de l’État voient leur action être démultipliée, au plus près des éleveurs et des animaux, par environ          19 000 vétérinaires sanitaires habilités.

En matière de diagnostic des agents responsables des maladies contagieuses, l’État s’appuie sur le réseau des laboratoires officiels, laboratoires nationaux de référence et laboratoires d’analyse agréés en santé animale, dont l’expertise et la réactivité sont indispensables pour la qualité du dispositif sanitaire.

Le dispositif inclut aussi les éleveurs, acteurs essentiels qui ont pour référents sanitaires les Groupements de défense sanitaire (GDS), constituant ainsi ce que l’on a longtemps dénommé le trépied sanitaire : État – Vétérinaires libéraux – Éleveurs.

Sa mise en place prend en compte l’ensemble des facteurs

La police sanitaire des animaux regroupe à la fois la surveillance épidémiologique, la prévention des maladies (information des éleveurs, visites sanitaires obligatoires, mise en place de règles de biosécurité dans les élevages et de protocoles de vaccination) et la lutte contre des nouveaux foyers de maladies infectieuses. Il s’agit le plus souvent en matière de lutte de la déclaration d’un éleveur à son vétérinaire sanitaire qui par la sagacité capitale de son diagnostic va être le lanceur d’alerte si précieux qui enclenche les étapes suivantes. Elles associent la visite sanitaire dans l’élevage suspect, la notification à la DDPP, le recensement, la séquestration et l’isolement des animaux malades ou suspects, la publication d’un arrêté de mise sous surveillance, la pratique de prélèvements pour analyses, le déclenchement d’une enquête épidémiologique préliminaire, la publication d’un arrêté portant déclaration d’infection, la détermination de périmètres de séquestration, de protection et de surveillance autour de l’élevage, la décision de mesures d’abattages et de vaccinations d’urgence du cheptel à protéger. Sauf à laisser à la maladie le temps de prospérer et de contaminer d’autres animaux ou troupeaux, qu’ils soient situés à proximité ou non, c’est dans l’extrême urgence que la lutte doit voir se succéder ces différentes étapes. Il est impératif de tenir compte de la possibilité des entrées et sorties d’élevage et des transports ainsi que de la pression croissante de la contamination par les  arthropodes dans le cas de maladies vectorielles.

Les mesures de police sanitaire, notamment le volet de lutte, comportent par nécessité des mesures contraignantes, surtout dans les élevages contaminés : blocage sanitaire et commercial de l’élevage, nettoyage-désinfection et désinsectisation des locaux, abattages d’animaux, délai avant le repeuplement. L’abattage des animaux dans les foyers est sans aucun doute la mesure la plus difficile à accepter pour les éleveurs et leurs familles au premier rang. Il en est de même pour les vétérinaires ainsi que pour la population qui peut y être exposée ne serait-ce qu’à travers une information qui s’accompagne trop rarement des tenants et des aboutissants de telles décisions. Il peut en effet dans certains cas s’avérer obligatoire pour assainir l’élevage de condamner des animaux apparemment sains alors qu’ils sont, soit en incubation, soit susceptibles de devenir des réservoirs asymptomatiques d’agents pathogènes qui constitueront une menace pour de nombreux élevages voire pour la population dans le cas de maladies zoonotiques.

La position de l’Académie vétérinaire de France

L’Académie vétérinaire de France encourage l’ensemble des acteurs qui participent à la police sanitaire, Services vétérinaires de l’État, vétérinaires libéraux et éleveurs à continuer à appliquer les mesures qui ont toujours permis de faire reculer les maladies animales contagieuses, épizootiques ou zoonotiques et surtout d’empêcher la contamination de nouveaux élevages sains. Ces mesures reposent sur les connaissances scientifiques les plus récentes qui sont validées par les agences scientifiques chargées de l’évaluation des risques sanitaires au plan national (ANSES :  Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail) comme au plan européen (EFSA - Autorité européenne de sécurité des aliments) et sont applicables dans l’ensemble de l’Union européenne.

Lire le communiqué ici